« La CSUQ m’a beaucoup donné, aujourd’hui, je veux lui redonner ce que j’ai reçu, avec reconnaissance et fierté »

Entrevue avec Karen Aflalo, nouvelle présidente de la CSUQ

Annie Ousset-Krief

Annie Ousset-Krief

Elias Levy

Elias Levy

KAREN AFLALO

Karen Aflalo. (Photo : Roland Harari)

C’est une femme leader résolue et visionnaire, Karen Aflalo, qui présidera, pendant les deux prochaines années, la Communauté sépharade unifiée du Québec (CSUQ). Elle succède à Jacques Saada, qui a rempli avec succès un mandat de quatre ans.

Karen Aflalo est la deuxième femme à diriger les destinées de la Communauté sépharade du Québec. La première fut Maryse Ohayon, présidente de 1995 à 1997.

Karen Aflalo a derrière elle un parcours communautaire marquant.

Conjuguant l’exigence de son travail avec un engagement communautaire passionné, elle a multiplié ses missions. Elle a amorcé son parcours communautaire à la CSUQ en 2009, où elle a participé à la création du premier programme de leadership et du programme pour jeunes adultes « Retour aux sources ». Elle a depuis assumé diverses fonctions importantes au sein de la CSUQ: vice-présidente pendant six ans; membre du conseil d’administration depuis dix ans; membre du Comité de la planification stratégique; coprésidente de deux programmes de leadership; présidente du « Cercle » pour les jeunes adultes; coprésidente de plusieurs campagnes de financement…

À la Fédération CJA, elle a été présidente de la Campagne YAD en 2014.

En 2019, elle a été élue présidente de la branche de Montréal du Fonds national juif (JNF). Cette organisation, fondée en 1901 par Theodor Herzl, contribue notoirement au développement socioéconomique d’Israël.

Karen Aflalo est graduée du Wexner Heritage Program, un prestigieux programme nord-américain de développement du leadership.

Elle a reçu plusieurs distinctions honorifiques décernées par la Fédération CJA: le prix du nouveau leadership Jon Roskies, le prix du leadership YAD, le prix du jeune leadership Gertrude et Henry Plotnick en reconnaissance de son engagement exceptionnel envers le peuple juif.

Karen Aflalo nous a parlé de ses priorités communautaires, des défis qu’elle aura à relever et de sa vision de l’avenir de notre communauté au cours d’une entrevue qu’elle a accordée à La Voix sépharade.

KAREN AFLALO

De gauche à droite : Joel Segal, président de la Fédération CJA, Karen Aflalo et Jacques Saada, président sortant de la CSUQ (Photo : Roland Harari)

Vous êtes engagée dans notre communauté depuis longtemps. Qu’est-ce qui vous motive ?

Si je suis pleinement engagée aujourd’hui dans ma communauté, c’est grâce à mes parents, Danielle et Armand Aflalo. Ils m’ont inculqué les valeurs communautaires fondamentales et l’importance du bénévolat. Je me suis impliquée très jeune au Centre communautaire juif (CCJ). Mais c’est à la CSUQ que j’ai commencé mon parcours communautaire. C’est cette institution, au sein de laquelle je suis activement engagée depuis 2009, qui a allumé en moi l’étincelle philanthropique et attisé ma passion pour l’action communautaire. J’ai toujours été très active au niveau du leadership jeunesse. Je veux redonner à ma communauté tout ce qu’elle m’a donné. C’est ce qui m’a le plus motivée.

La présidence de la CSUQ, c’est un grand défi pour vous ?

Absolument. Durant les quatre dernières années, Jacques Saada a accompli un travail remarquable. Il a été un leader qui a non seulement donné de son temps, mais qui a également su insuffler du vent dans les voiles de la CSUQ, permettant ainsi à cette institution d’atteindre de nouveaux horizons. Jacques est un homme réfléchi et intègre qui a su rassembler des bénévoles de tous les horizons pour aider la CSUQ à atteindre des objectifs ambitieux. Il est parvenu à convaincre de jeunes adultes à s’engager au sein de leur communauté. Il leur a confié des responsabilités majeures. Sur le plan financier, la CSUQ n’a plus de dettes. Il est donc important de poursuivre son travail.

La Communauté sépharade, majoritairement francophone, est en expansion. Elle s’est pleinement intégrée au Québec, qui l’a accueillie avec générosité. Elle est aujourd’hui une communauté reconnue et respectée. Les réussites des Sépharades dans tous les domaines sont nombreuses. Nous devons nous enorgueillir des réalisations admirables que les leaders sépharades qui m’ont précédée ont accomplies avec un grand dévouement au cours des six dernières décades. Il est important que notre communauté ait à sa tête quelqu’un qui saura la servir comme il se doit et l’aidera à grandir. Je suis fière de cette nomination qui couronne mon parcours communautaire à la CSUQ, 25 ans après qu’une première femme, Maryse Ohayon, ait présidé cette organisation.

Est-ce un défi supplémentaire le fait que vous soyez la deuxième femme à diriger les destinées de la Communauté sépharade du Québec ?

Ma communauté m’a toujours appris qu’une jeune femme sépharade, comme moi, pouvait accomplir les plus grands projets, avoir les plus grandes ambitions et les plus grands rêves. C’est inspirant! Mon souhait est de créer des possibilités similaires pour les générations à venir! Tout comme mes prédécesseurs l’ont fait pour moi.

La relève communautaire est-elle une priorité pour vous ?

Oui. L’un de nos plus grands défis est d’assurer la pérennité du judaïsme sépharade en transmettant les valeurs de notre riche patrimoine aux jeunes. Aujourd’hui, bon nombre de jeunes adultes sépharades affichent une indifférence à l’égard de notre communauté. Certains ne se sentent pas représentés par la CSUQ. Nous devons absolument renverser cette perception. Pour y parvenir, nous devons nous rapprocher d’eux et écouter attentivement leurs attentes, et aussi leurs critiques. N’oublions jamais que les jeunes sont le principal gage de l’avenir de notre communauté. Nous devons les mobiliser et les encourager à s’engager à nos côtés. C’est pourquoi je tiens à relancer les programmes pour les jeunes, notamment ceux destinés aux jeunes adultes. Nous allons aussi renforcer les programmes de leadership qui sont très importants.

La planification stratégique de la CSUQ a conféré un rôle de premier plan aux jeunes. La relève est indéniablement l’une de nos grandes priorités. J’ai une longue expérience dans ce domaine. Mais mettre l’emphase sur la jeune génération ne signifie pas pour autant abandonner les autres groupes d’âge. La CSUQ doit continuer à offrir des programmes de qualité à toute la population sépharade.

Quelles sont vos autres grandes priorités ?

– Développer des projets de financement innovants afin d’assurer l’indépendance financière de la CSUQ. Il y a sept ans, la CSUQ avait une dette de presque 1 million de dollars. Nous avons réussi à la résorber complètement. Nous avons maintenant le devoir de grandir et de devenir indépendants financièrement pour être libres de choisir les programmes que nous voulons offrir à notre communauté et assumer nos ambitions.

– Mettre en valeur la CSUQ en améliorant la communication et le marketing. La CSUQ a fait de grands efforts au cours des dernières années dans ce domaine. Mais, faute de ressources, nous sommes limités. Il faut s’investir davantage dans ce créneau fondamental. Nous devons, par exemple, accroître notre présence et notre visibilité sur les réseaux sociaux, qui sont aujourd’hui les plus importants vecteurs de communication pour nos jeunes.

– Renforcer nos partenariats, particulièrement avec la Fédération CJA et ses agences, afin de continuer à faire rayonner la CSUQ, tout en préservant la spécificité de la communauté sépharade. Les relations entre les deux institutions n’ont jamais connu une meilleure époque. Un excellent partenariat basé sur le respect et l’écoute mutuels.

– Continuer à développer nos relations avec nos constituantes en améliorant notre réseau de communication avec celles-ci et en favorisant les activités conjointes.

Comment voyez-vous l’avenir de la communauté sépharade ?

L’avenir s’annonce très prometteur. Nous avons une communauté de jeunes professionnels qui se distinguent dans de nombreux domaines. Nous avons deux écoles sépharades francophones de qualité, Maïmonide et l’Académie Yéchiva Yavné. Nous devons faire valoir tous ces atouts, maintenir et renforcer notre spécificité, tout en faisant partie intégrante de la grande communauté juive montréalaise.

Mais la communauté sépharade a connu d’importantes mutations au cours de la dernière décennie. Nous devons nous adapter aux attentes et aux demandes de la nouvelle génération. Nous adapter aussi à la façon dont nous communiquons avec celle-ci – utiliser les médias sociaux, comme Instagram, Tik Tok, Facebook. Nous ne devons plus nous limiter à un seul mode de communication, comme nous le faisions par le passé. Regarder l’avenir avec confiance, c’est avoir une vision du futur et aussi une vision d’adaptation. L’avenir de notre communauté dépendra de ce que nous faisons aujourd’hui. Je suis optimiste pour l’avenir.

Préserver l’héritage du passé de la Communauté sépharade est-ce important pour vous ?

Bien sûr. Miser sur le futur, ça ne veut pas dire faire table rase du passé. Nous devons être capables de conjuguer passé, présent et futur. C’est le plus grand défi auquel nous sommes confrontés. Un défi que je suis prête à relever, appuyée par un conseil d’administration qui rassemble des bénévoles élus très motivés de toutes les générations, prêts à travailler dans le même sens. Cet immense chantier requiert plus que le seul engagement d’une présidente. Je suis heureuse et fière d’avoir été choisie pour cette fonction. La CSUQ m’a beaucoup donné, aujourd’hui, je veux lui redonner ce que j’ai reçu, avec reconnaissance et fierté.

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