La Shoah et l’Afrique du Nord : un colloque qui s’insère dans un contexte prometteur

Elie Benchetrit

 Par Elie Benchetrit 1

Elie Benchetrit

Elie Benchetrit

 

 

 

 

 

« L’objectif de notre colloque n’est autre que de nous aider à mieux comprendre, à travers les exposés et les points de vue d’historiens juifs et musulmans et éminents spécialistes de l’Afrique du Nord qui ont accepté notre invitation, cette tragique période de l’histoire du peuple juif. Notre mission est d’apporter un éclairage nouveau sur les rapports entre musulmans et Juifs pendant la Shoah dans trois pays : Le Maroc et la Tunisie (sous protectorat français) et l’Algérie (département français à cette époque). Nous sommes convaincus du bien-fondé du thème que nous avons choisi, compte tenu de la reprise des relations diplomatiques entre le Maroc et Israël et de la reconnaissance de ce dernier par plusieurs États du Golfe. » Avraham Elarar, président de la Fédération Sépharade du Canada.

Dans le cadre du Festival Séfarad de Montréal, la Fédération Sépharade du Canada, sous l’égide de la Fédération Sépharade mondiale, en partenariat avec la Communauté sépharade unifiée du Québec (CSUQ), le Musée de l’Holocauste de Montréal, le Centre Culturel Marocain de Montréal et le Fonds National Juif du Canada (région du Québec) ont organisé un colloque de deux jours les 14 et 15 novembre derniers en 2021.
À l’origine, cette activité devait avoir lieu il y a deux ans selon le souhait de M. Avraham Elarar qui après avoir lu l’ouvrage de l’universitaire américain Robert A. Satloff, Among the righteous : Lost memories from the Holocaust’s Long reach into Arab lands, souhaitait mettre en lumière le rôle joué par des citoyens musulmans dans les pays du Maghreb sous le régime de Vichy pour sauver des Juifs. Des circonstances indépendantes de notre volonté ont fait que le projet initial fut reporté à deux ans plus tard. Ce délai nous a permis de le peaufiner pour pouvoir présenter à notre public un produit de qualité. La réalisation de cet événement qui venait à point nommé après la signature des Accords d’Abraham d’Israël avec certains pays du Golfe, le rétablissement de relations diplomatiques entre Israël et le Maroc avec, dans un premier temps la nomination de chargés d’affaires dans les deux pays et surtout la poursuite d’une politique de remise à l’honneur du patrimoine juif au Maroc mené depuis des années par le gouvernement marocain sous la conduite de S.M Mohammed VI, constituait un alignement des étoiles en notre faveur.
Malheureusement, la pandémie qui nous affecte depuis deux ans ne nous a pas aidés dans notre projet et nous avons dû présenter des conférences en format hybride et d’autres en virtuel, ce qui a eu une influence non négligeable sur l’affluence du public, mis à part la projection du film Les hommes libres qui a fait salle comble. Ceci dit, ce n’est pas l’absence de têtes d’affiche qui a fait défaut. Les équipes chargées du projet tant du point de vue de la conception que de celui de la réalisation ont, comme on dit dans le langage courant « bien livré la marchandise ».
En deux jours, notre public, qui aurait dû être plus nombreux en temps normal, a pu apprécier les interventions magistrales des conférenciers invités : les historiens Benjamin Stora et Georges Bensoussan (France), Abdelhamid Larguèche (Tunisie), Yolande Cohen (Montréal), les universitaires marocains Abdellah Ouzitane, Mohammed Hatmi, Driss Khrouz, qui se sont déplacés à Montréal de même que le cinéaste Ismaël Ferroukhi, présenté lors de la projection de son magnifique film Les hommes libres par le spécialiste cinématographique et membre du Jury du Festival du cinéma israélien à Montréal, Elie Castiel, l’auteur et universitaire américain Robert Satloff en entrevue avec le journaliste torontois Ralph Benmergui. Les conférences qui ont eu lieu en mode présentiel et hybride se sont déroulées dans la synagogue Spanish & Portuguese et dans la belle et prestigieuse salle de conférences de Dar el Maghrib que le Centre Culturel Marocain a mis gracieusement à notre disposition grâce à sa charmante et efficace directrice Mme Houda Zemmouri que nous tenons à remercier à travers ces lignes.
En organisant ce colloque, la Fédération Sépharade du Canada, sous l’impulsion de son président M. Avraham Elarar, a tenu à mettre en avant notre désir de poursuivre et surtout de renforcer le dialogue judéo-musulman amorcé il y a quelques années sous l’égide du groupe « Mémoires et dialogue » et tout particulièrement avec la composante marocaine. L’engagement de notre Fédération dans ce processus de rapprochement qui, au-delà du politique, met l’accent sur la coopération culturelle et scientifique, musicale, entre le Maroc et Israël ne saurait être mieux illustré que par notre participation effective marquée par la présence et l’engagement à Tel-Aviv d’Avraham Elarar au début de novembre lors du colloque qui s’est tenu à l’Université Bar Ilan sur le Droit hébraïque au Maroc, auquel participèrent des chercheurs et universitaires marocains conjointement avec leurs homologues israéliens. L’exemple de Bayt Dakira, inauguré par le Roi Mohammed VI, est un réel espace de tolérance qui vise à préserver la mémoire des Juifs d’Essaouira. « Unique en son genre au sud de la Méditerranée et en Terre d’Islam, la Maison de la Mémoire (traduction directe de Bayt Dakira) témoigne du passé judéo-musulman d’Essaouira, de la destinée exceptionnelle des Juifs de Mogador, de leurs relations avec les populations musulmanes, qui ont toujours été riches et bienveillantes 2» . Le Colloque « La Shoah et l’Afrique du Nord » a bénéficié de l’appui humain, technique et moral de la CSUQ dont le président M. Jacques Saada qui nous a soutenus dès le début dans le choix du sujet et bien entendu son directeur général M. Benjamin Bitton dont la disponibilité et celle de son personnel dévoué nous ont été d’une aide précieuse. Qu’ils en soient chaleureusement remerciés.

 

 

Notes:

  1. 1. Notre collaborateur s’exprime ici en tant que secrétaire général de la Fédération Sépharade du Canada
  2.  Voir https://fr.wikipedia.org/wiki/Bayt_Dakir
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