Les Juifs du Mexique
PAR Elie Benchetrit
À l’initiative de la Fédération sépharade du Canada, nous inaugurons une nouvelle série d’articles en espagnol pour mieux faire connaître les communautés juives sépharades dans le monde et le legs de leur culture. Une introduction en français de notre collaborateur présente cette communauté juive du Mexique et résume ces différents articles ou entretiens
Au moyen de deux articles, que les auteurs Alberto Lévy Oved, président de Fesela Mexico, et Aaron Rosenzweig-Misrahi, jeune étudiant et entrepreneur, nous ont transmis, nous poursuivons la série de reportages qui vous feront découvrir des communautés juives partout au monde. Après l’Argentine, nous avons choisi le Mexique avec une histoire fascinante concernant l’établissement des premiers Juifs lors de la conquête par les Espagnols de ce vaste territoire que fut l’Empire Maya.
Alberto Lévy Oved nous fait remonter le temps pour situer la présence juive dans son pays au 16e siècle lors des premières expéditions du conquistador Hernan Cortés et qui comptèrent dans ses rangs un certain nombre de « conversos » (juifs convertis au catholicisme). En 1578, le roi Philippe II d’Espagne chargea Luis de Carvajal de procéder à la conquête du nord de la vice-royauté du Mexique. Carvajal, fut accompagné dans son expédition par de nombreux Juifs convertis. L’inquisition installée dans ce pays depuis 1548 accusa alors Carvajal d’être un « judaïsant » et détruisit plusieurs réseaux communautaires juifs dans le pays. Un neveu de Carvajal fut le premier auteur d’un ouvrage connu pour avoir mis de l’avant l’importance des Juifs dans l’établissement des premiers colons espagnols et le rôle néfaste de l’Inquisition.
Les lois instaurant la liberté religieuse au Mexique datent de 1860, cependant les juifs qui y émigrent vers la fin du 19e siècle s’identifiaient majoritairement en fonction de leur origine nationale et non de leur appartenance religieuse. C’est en 1912 que fut créée la Sociedad de Beneficiencia Alianza Monte Sinai et que l’on construisit la première synagogue, le premier cimetière et que commencent les premiers travaux relatifs à l’entraide envers les plus nécessiteux. Par la suite, la branche ashkénaze se sépara afin de construire sa propre synagogue proche de la première et en créant de nouvelles institutions correspondant à ses propres traditions. Le flux migratoire des Juifs en provenance d’Europe et de la Méditerranée orientale fut accueilli par les institutions communautaires établies sur place.
Vers la fin des années 30, les Juifs originaires d’Alep en Syrie se séparent du tronc commun de même que ceux originaires des Balkans pour former des communautés spécifiques à leur groupe ethnique. D’autres communautés d’origine ashkénaze se constituèrent tout en abandonnant l’orthodoxie religieuse pour se définir comme « conservative ». On peut donc affirmer que nous sommes en présence de 6 communautés différentes qui définissent les différentes particularités d’origine, de religion, de traditions et de culture des Juifs du Mexique.
Il est important de signaler la présence de la Fédération sépharade latino-américaine, Fesela au Mexique depuis 45 ans, d’origine orientale et sépharade dont la mission est de conserver la culture, de diffuser son histoire et d’être présente dans les divers forums internationaux sépharades tout en appuyant les organisations sionistes partout au monde.
La population juive concentrée principalement dans la ville de Mexico compte 45 000 âmes, On compte d’autres communautés dans d’autres villes du pays. Le taux d’assimilation est considéré comme assez bas. Il existe 13 institutions éducatives fréquentées par 90 % des enfants juifs. Les valeurs juives et sionistes sont présentes au sein de ces institutions et le taux de diplomation universitaire est très élevé au sein de la communauté. La Communauté juive mexicaine est l’une des plus belles au monde où l’on peut compter un système de services de haut niveau dans une ambiance de solidarité et de fraternité.
Un jeune étudiant et entrepreneur Aaron Rosenzweig a bien voulu répondre à nos questions concernant son engagement au sein de sa communauté ainsi que les défis à relever en cette période de pandémie. Il met l’accent sur le bas niveau d’assimilation et souligne cependant le manque d’engagement des jeunes au niveau du leadership, celui-ci étant accaparé par la « vieille génération des bâtisseurs ». Un problème qui, avouons-le, nous est également familier. Israël est central et au cœur de l’action communautaire. Il est très optimiste quant à son avenir au Mexique et se félicite d’avoir participé au Congrès de Fesela et des jeunes sépharades d’Israël organisé par la Fédération sépharade du Canada, la CSUQ, et la Fédération sépharade mondiale qui eut lieu à Montréal en novembre 2019.