Rencontre avec Sylvan Adams, un grand philanthrope passionné par Israël

« L’Université Ben Gourion du Néguev est un pilier important
d’Israël »

par Elias Levy

Sylvan Adams

Homme d’affaires et philanthrope canado-israélien renommé, Sylvan Adams a fait un don de 100 millions de dollars américains à l’Université Ben Gourion du Néguev dans le cadre d’une campagne mondiale visant à renforcer le sud d’Israël.

Ce grand passionné de cyclisme, qui a fait son Aliya en 2016, se considère comme « un ambassadeur autoproclamé itinérant de l’État d’Israël ». Sa mission : réhabiliter l’image d’Israël au niveau international en organisant des événements culturels et sportifs d’envergure mondiale.

Sylvan Adams a accordé une entrevue à La Voix sépharade.

Le 14 janvier dernier, vous avez organisé, avec votre équipe de cyclisme Israël-Premier Tech (IPT), une grande randonnée cycliste à travers le monde pour marquer les 100 jours de captivité des otages israéliens détenus par le Hamas à Gaza. Cet événement sportif inédit a connu un grand succès.

Ce fut un moment de solidarité très émouvant. Des dizaines de milliers de personnes ont participé au Vélodrome de Tel-Aviv et dans plus de quarante villes du monde – Paris, Barcelone, Bruxelles, Londres, Los Angeles, Miami, Toronto, Hong Kong, Melbourne, Sidney, Buenos Aires, São Paulo… – à cette grande randonnée de solidarité avec les otages israéliens séquestrés par le Hamas. Des membres des familles des otages ont pédalé avec nous à Tel-Aviv et se sont adressés aux participants. Des témoignages très poignants.

Nous avons encouragé les participants à attacher un ruban jaune au guidon de leur vélo en guise de solidarité avec les 139 otages sous la férule des terroristes du Hamas. L’un des plus grands cyclistes de l’histoire, Chris Froome, légendaire quadruple champion du Tour de France, a été l’un des principaux parrains de cette « Randonnée pour la liberté ». Celle-ci a rappelé au monde nos valeurs d’esprit sportif et d’équité, aux antipodes de la brutalité du Hamas. Ce fut un rassemblement sportif symbolique.

Nous sommes bien conscients que le Hamas ignorera notre appel exigeant la libération immédiate des otages. L’esprit de résilience de Natan Sharansky, ancien refuznik soviétique, a toujours été pour moi un modèle d’inspiration. Il m’a dit que ce qui lui a permis de survivre lorsqu’il était prisonnier dans un goulag, c’est le soutien indéfectible que lui exprimaient sans relâche les milliers de manifestants à travers le monde qui réclamaient sa libération par les autorités soviétiques.

Quels sentiments vous habitent depuis la journée macabre du 7 octobre ?

Le peuple d’Israël est très résilient. Le Hamas a réussi une seule chose dans cette sinistre guerre : unir les Israéliens. Les querelles qui ont divisé ces derniers en 2023 sont désormais révolues. Le peuple d’Israël n’a jamais été aussi uni et solidaire. L’appui inconditionnel que lui prodigue la grande famille juive de la Diaspora depuis le début de cette guerre que les terroristes du Hamas nous ont imposée est vital pour Israël. Depuis la journée noire du 7 octobre, l’esprit de solidarité qui anime les Israéliens est bouleversant. Aujourd’hui, Israël est une nation très forte.

Nous allons gagner cette guerre à Gaza pour une raison très simple que ne cessait de rappeler l’ancienne première ministre d’Israël, Golda Meir : « Les Israéliens n’ont pas un autre endroit où aller. » Mais avant, Israël devra détruire toutes les infrastructures militaires du Hamas et sécuriser le territoire de Gaza. Les otages sont omniprésents dans nos pensées. Nous pleurons les nombreux jeunes soldats et soldates de Tsahal tués dans des combats féroces à Gaza. C’est une grande tragédie. Chaque décès d’un jeune soldat ou soldate est fortement ressenti dans tout le pays. C’est comme si nous venions de perdre un membre de notre famille. Mais, malgré toute cette adversité à laquelle le peuple d’Israël est confronté aujourd’hui, je suis confiant pour l’avenir.

Pourquoi avez-vous décidé d’appuyer vigoureusement le développement de l’Université Ben Gourion du Néguev ?

L’Université Ben Gourion, l’une des plus importantes universités d’Israël, est une oasis d’innovation. Elle excelle notoirement dans des domaines de recherche fondamentaux qui sont en train de façonner le futur de l’humanité. Ses réputés scientifiques s’attaquent frontalement aux problèmes planétaires les plus urgents et les plus difficiles. Ils mènent des recherches de pointe sur la gestion de l’eau dans des régions désertiques, le développement durable, l’énergie solaire, la physique environnementale, l’écologie du désert… Ils explorent des voies révolutionnaires pour contrer le réchauffement climatique auquel l’humanité fait face. L’Université Ben Gourion est aussi un leader mondial en matière de recherche dans d’autres domaines de pointe: la santé mondiale, l’autisme, les technologies médicales, la haute technologie, les biotechnologies, la robotique, la cybersécurité…

Quel est le principal objectif du don de 100 millions de dollars que vous venez d’octroyer à l’Université Ben Gourion ?

C’est le don le plus important que j’ai fait jusqu’ici. Un don atypique puisque je n’ai pas demandé aux dirigeants de l’Université Ben Gourion que celui-ci soit alloué à un département en particulier ou à des projets spécifiques. Je leur ai dit : « Vous connaissez beaucoup mieux que moi les besoins et les priorités de votre université. Je vous demande une seule chose : rendez-la encore plus forte. » Après les effroyables tueries du 7 octobre commises par le Hamas, avec ce don, je tenais à poser un geste symbolique : démontrer concrètement aux habitants du sud d’Israël que nous ne les abandonnerons jamais et que nous serons toujours à leurs côtés.

Pour vous, le développement du sud d’Israël doit être une grande priorité nationale.

Absolument. Si nous voulons que le sud continue à prospérer après les abominables événements du 7 octobre, nous devons investir massivement dans cette région vitale d’Israël, en commençant par sa capitale, Beer Sheva. David Ben Gourion, leader visionnaire, fut le premier à comprendre que le Néguev est le cœur battant d’Israël. L’Université Ben Gourion incarne un futur prometteur. C’est pourquoi il est impératif de renforcer le sud d’Israël en investissant dans sa jeunesse et son éducation. Pour cela, nous devons faire preuve de leadership et continuer à développer les infrastructures et à attirer une main-d’œuvre qualifiée dans le sud. Je suis très fier de faire partie de la famille de l’Université Ben Gourion, un pilier important d’Israël. Pendant que le Hamas continue à détruire, nous, nous sommes là pour bâtir et rester pour toujours sur cette terre qui est la nôtre.

Vous avez fait aussi des dons importants à d’autres institutions israéliennes.

J’ai fait des dons majeurs à l’Université de Tel-Aviv. En 2018, cette université a inauguré un Institut des sports qui porte mon nom qui a pour mission le développement sportif par le truchement de la science. En 2022, l’Hôpital Ichilov de Tel-Aviv a inauguré la plus grande salle d’urgence du monde, d’une superficie de 86 000 mètres carrés, baptisée Sylvan Adams Emergency Hospital. J’ai parrainé la construction de l’Hôpital pour enfants Sylvan Adams au sein du Centre médical Wolfson, sis à Holon. J’ai aussi financé au Centre médical Assaf Harofeh, situé à proximité de Tel-Aviv, la construction de nouveaux laboratoires de recherche spécialisés dans le traitement hyperbare (qui consiste à faire respirer 100 % d’oxygène à un patient dans une chambre hyperbare où la pression est augmentée de plusieurs fois la pression atmosphérique). Israël est un leader dans ce domaine de recherche médical.

Vous êtes le propriétaire de l’équipe de cyclisme professionnel Israël-Premier Tech (IPT). C’est la première équipe israélienne à participer à des compétitions cyclistes internationales de très haut niveau, notamment le Tour de France, où IPT a remporté trois victoires éclatantes.

IPT fait rayonner l’image d’Israël dans le monde entier auprès d’énormes auditoires qui suivent les compétitions cyclistes en direct à la télévision. En 2018, j’ai convaincu les organisateurs du prestigieux Giro d’Italie d’amorcer en Israël, à Jérusalem, les trois premières étapes de cette course cycliste mythique, la Grande Partenza. Tous les deux ans, le Giro d’Italia et le Tour de France démarrent leur course avec trois étapes qui se déroulent dans un pays européen limitrophe. Pour la première fois, le Giro a débuté sa course dans une contrée non européenne, Israël. Plus d’un milliard de téléspectateurs ont ainsi découvert les magnifiques paysages d’Israël captés par les hélicoptères qui suivaient les cyclistes. En trois jours, le Giro a permis au monde entier de découvrir une autre image d’Israël. Je suis en discussion avec les organisateurs du Tour de France pour qu’ils suivent l’exemple du Giro en amorçant le début de cette course légendaire en Israël.

L’équipe IPT est-elle visée par les campagnes de boycott anti-Israël ?

Jusqu’à présent non. IPT est invitée officiellement aux principales compétitions cyclistes internationales. Mais, malheureusement, les sportifs israéliens doivent composer avec les campagnes de boycott anti-Israël qui sévissent aussi dans l’univers sportif, surtout en Europe. La recrudescence de l’antisémitisme que nous connaissons actuellement accentue ce phénomène pernicieux. Le plus important est de ne pas céder face aux intimidations des détracteurs d’Israël.

Vous êtes résolument convaincu que le sport peut contribuer de manière significative à promouvoir la paix entre Israël et le monde arabe.

IPT est plus qu’une équipe cycliste, elle a une mission sociale : promouvoir la coexistence, la paix et la fierté nationale israélienne dans le monde entier. Le sport est un outil puissant pour rapprocher les peuples, les religions et les ethnies. Début 2020, j’ai convaincu les autorités des Émirats arabes unis d’inviter IPT. Ainsi, pendant plusieurs jours, les cyclistes d’IPT ont roulé sur les routes de Dubaï et d’Abu Dhabi en arborant leur maillot sur lequel est inscrit le nom « Israël ». Des centaines d’enfants émiratis ont fait la queue pour recevoir l’emblème de notre équipe sur lequel est apposé aussi en grandes lettres le nom « Israël ».

Ces efforts visant à rapprocher les peuples d’Israël et des Émirats arabes unis m’ont valu le privilège d’être l’un des rares Israéliens à être invités six mois plus tard à la cérémonie de signature des accords historiques d’Abraham à la Maison-Blanche, à Washington. Les négociateurs américains de cet accord m’ont dit que l’accueil chaleureux réservé aux cyclistes d’IPT aux Émirats arabes unis a fini par convaincre les gouvernants de ce pays que la population émiratie n’éprouve aucune haine envers Israël et le peuple juif. Ils m’ont assuré que mon initiative les avait aidés à surmonter les derniers obstacles qui entravaient la signature de l’accord final.

Vous essayez aussi de promouvoir Israël dans l’arène du football international.

En 2020 et 2021, j’ai convaincu la Fédération française de football d’organiser, au stade Bloomfield de Tel-Aviv, la finale du Trophée des champions, opposant le vainqueur du Championnat de France au vainqueur de la Coupe de France. À cause de la pandémie de COVID-19, en France, les matchs se jouaient alors sans public. Le club Paris Saint-Germain participa deux fois à cette finale. Ce fut pour moi l’occasion de souhaiter la bienvenue à Lionel Messi sur le tarmac de l’Aéroport Ben Gourion de Tel-Aviv.

J’ai rencontré Gianni Infantino, président de la FIFA (Fédération internationale de football association). Je lui ai proposé que la Coupe du monde de football de 2030 soit organisée par quelques pays du Moyen-Orient, l’Arabie saoudite, l’Égypte… Israël pourrait aussi accueillir des matchs de ce Mundial. Je lui ai longuement expliqué pourquoi la tenue de cet événement planétaire dans cette région pourrait être un puissant vecteur de rapprochement et de paix. Il a aimé mon idée. Mais, depuis, l’Espagne, le Maroc et le Portugal nous ont devancés en soumettant leur candidature pour le Mundial de 2030. Nous réessayerons pour le Mundial de 2034.

Avez-vous un message à transmettre aux membres de la Communauté juive de Montréal?

J’habite en Israël, mais une partie de mon cœur est restée ancrée au Québec, particulièrement à Montréal, où je suis toujours très engagé auprès de la magnifique communauté juive de cette ville. Je supporte des projets éducatifs, culturels et sportifs importants : l’École Herzliah, le YM-YWHA… Je n’ai pas abandonné mes anciens concitoyens québécois. Je suis très heureux d’avoir fait mon Aliya, mais Montréal occupera toujours une place particulière dans mon cœur. La communauté juive de Montréal s’est toujours distinguée par son dynamisme, sa grande générosité et son profond attachement à Israël. Depuis le 7 octobre, le soutien moral et financier que les Juifs de Montréal ont prodigué au peuple d’Israël, meurtri par une vague de terreur atroce, est fortement apprécié par tous les Israéliens. En ces jours si sombres, nous sommes tous Israéliens.