Jonathan Abenaim, jeune gestionnaire d’un Hedge Fund américain
par Elias Levy
Passionné par la bourse et l’univers de la finance, Jonathan Abenaim gère à 27 ans un ambitieux fonds d’investissement (hedge fund) américain, Arlen House (arlenhousecapital.com).
Ce diplômé de l’École Herzliah de Montréal, détenteur d’un baccalauréat en finances-comptabilité de l’Université d’Ottawa – il a étudié en finances pendant une année à l’Université de Genève dans le cadre d’un programme de coopération interuniversitaire – est devenu accro des placements boursiers lorsqu’il était adolescent.
« En 2009, à la veille de la célébration de ma Bar-Mitzvah, mon oncle paternel, qui venait de prendre sa retraite du monde des finances où il avait œuvré plusieurs années, me dit : « Comme cadeau, je vais t’acheter des parts d’une compagnie de ton choix. » J’ai choisi Apple. Ce fut un déclic immédiat! Ce jour-là, ma première action en poche, j’ai su exactement ce que j’allais faire de ma vie. Je devins obsédé avec les investissements en bourse. Je me levai le matin et me couchai le soir en décryptant l’ADN d’un investissement réussi sur les marchés boursiers. Depuis, j’essaye de comprendre les fondements d’un investissement profitable. Ce fut ma première grande école, celle du terrain, du concret », raconte Jonathan.
Il est très vite séduit par les conseils financiers judicieux prodigués par le célèbre financier et investisseur américain Warren Buffett, à qui il voue une immense admiration. Ce dernier continue à l’inspirer fortement encore aujourd’hui.
À l’été 2018, Jonathan vit sa première grande expérience professionnelle, à New York, dans une firme d’investissements.
« Une expérience qui m’a profondément marqué et m’a conforté dans mon désir de travailler le reste de ma vie dans le monde des investissements financiers. Je n’ai jamais été attiré par quoi que ce soit d’autre. »
Établi à Miami, en Floride, le fonds d’investissement Arlen House, que Jonathan a fondé en 2021, est composé de quatre compagnies américaines, dont Light and Wonder, entreprise fabriquant des machines à sous pour les casinos américains et canadiens, qui constitue à peu près 20 % du capital, et GFL, une compagnie spécialisée dans les systèmes de ramassage des poubelles, et de deux compagnies européennes. Elles sont toutes publiques.
Principaux objectifs : repérer des compagnies hors norme ayant un fort potentiel de croissance, dirigées par des équipes de direction très dynamiques, et attirer de nouveaux capitaux.
« Mon plus grand défi : prévoir où est-ce que ces compagnies seront rendues d’ici 5 à 10 ans », souligne-t-il.
Pourquoi ne mise-t-il pas sur des compagnies œuvrant dans le créneau de la haute technologie?
« Je vais certainement vous surprendre, mais le High-Tech n’est pas un secteur qui m’attire, car il est en constante évolution. Des compagnies qui performaient il y a ving ans dans le domaine du High-Tech, telles que BlackBerry ou Kodak, n’existent plus. Elles ont été victimes du progrès technologique. Tous les jours, de nouvelles technologies viennent supplanter d’autres qui connaissaient jadis des succès fulgurants. Deux jeunes reclus dans leur garage peuvent chambarder profondément la technologie. La compétition est féroce dans ce secteur. Je préfère miser sur des compagnies dont le mode opératoire ne changera pas dans cinq ou dix ans, par exemple la façon dont on ramasse les poubelles. Des compagnies beaucoup moins assujetties aux aléas des évolutions technologiques dont je serai capable de prédire la direction dans les cinq à dix ans à venir. Les compagnies tablant sur la croissance verte ou le développement durable ne m’intéressent pas non plus, car je n’ai pas l’expertise requise pour pouvoir suivre rigoureusement leur évolution à long terme. »
Protéger le capital qui lui a été confié est une priorité constante.
« Il y a deux types de risques en investissement : la volatilité d’une action et la volatilité des profits, explique-t-il. Je ne me soucie point de la volatilité d’une action. Si celle-ci baisse de 20 %, ça ne m’inquiète pas outre mesure, car ce qui me préoccupe avant tout c’est de déterminer si les profits de l’entreprise en question seront à la hausse à long terme, c’est-à-dire non pas dans un ou deux ans, mais dans cinq ans. Il faut savoir tirer avantage de la volatilité des actions. »
Les échecs ne sont-ils pas monnaie courante dans sa profession?
« On peut se tromper sur les perspectives à long terme d’une compagnie. Personne n’a une boule de cristal pouvant prédire l’avenir. Il ne faut pas craindre les échecs, au contraire, ceux-ci nous permettent souvent de mieux rebondir. »
Jonathan applique-t-il au quotidien un style de gestion particulier ?
« Mon action quotidienne est guidée par une maxime du président américain Abraham Lincoln : « Si tu me donnes dix minutes pour abattre un arbre, je passerai les neuf premières minutes à aiguiser ma hache. » C’est comme ça que je vois le monde. Je passe mes journées à apprendre, à essayer de comprendre le monde et à utiliser toutes les connaissances que j’ai acquises dans divers domaines – finances, économie, politique, géopolitique, sciences, environnement…– dans mon travail quotidien. Trouver de nouvelles occasions en matière d’investissement, ce n’est pas facile. Ça requiert une approche très réfléchie et méthodique. »
Comment envisage-t-il les perspectives des marchés financiers pour 2024 ?
« Si vous m’aviez posé cette question il y a trois ans, je vous aurais répondu que j’étais pessimiste. Le prix des actions en bourse était alors très élevé. Aujourd’hui, je suis optimiste à court et à long terme. Le prix des actions a baissé, l’inflation diminue, les taux d’intérêt commencent à reculer. Les tendances boursières à court terme ne m’ont jamais préoccupé. Je ne m’intéresse pas aux tendances macroéconomiques, mais aux facteurs microéconomiques. Ma perspective se focalise toujours sur le long terme. »
Chose certaine, Jonathan n’est pas à la veille de se lasser du monde ultra-compétitif dans lequel il évolue.
« Ce que je fais me passionne. C’est le projet de ma vie. J’espère le poursuivre encore
pendant 70 ans ! »