« Israël combat une organisation barbare, sanguinaire et terroriste »
Entrevue avec l’Ambassadeur Avi Pazner
par Elias Levy

L’ampleur des massacres commis par des terroristes du Hamas le 7 octobre dernier, lors de la célébration de Simhat Torah, a profondément tramautisé Israël et tout le peuple juif. Des scènes horrifiantes de carnage, sans précédent dans l’histoire contemporaine d’Israël. Un bilan des plus sinistres : plus de 1400 civils israéliens assassinés lâchement et plus de 2400 blessés.
Ancien conseiller politique de plusieurs premiers ministres d’Israël, ancien porte-parole du gouvernement d’Israël, ancien président mondial du Keren Hayesod-Appel unifié pour Israël et ex-Ambassadeur d’Israël en France et en Italie – il a été, au début des années 90, l’architecte de la normalisation des relations diplomatiques entre l’État d’Israël et le Vatican –, Avi Pazner nous a livré, depuis Jérusalem, ses vues sur le nouveau conflit qui oppose Israël au Hamas.
Cette entrevue a été réalisée le 11 octobre dernier alors que la guerre faisait déjà rage.
Le 7 octobre a été une journée noire et de grande terreur pour le peuple d’Israël. Le pays n’avait jamais subi un tel traumatisme.
C’est indéniablement l’un des moments les plus tragiques et les plus difficiles que les Israéliens ont vécus depuis la création de leur pays, il y a 75 ans. À certains points de vue, même plus difficile que la guerre du Kippour de 1973. Plus de 1400 Israéliens ont été sauvagement assassinés par les barbares du Hamas le jour de Simhat Torah. Proportionnellement à la population d’Israël en 2023, c’est deux fois plus que les 2600 Israéliens tués lors de la guerre du Kippour. En 1973, Tsahal a pu redresser la situation, nous combattions alors des pays arabes avec lesquels nous avons conclu des cessez-le-feu. Dans le cas du Hamas, nous combattons une organisation barbare, sanguinaire et terroriste que nous devons absolument vaincre et éliminer parce qu’elle a prouvé au monde qu’elle est incapable de vivre à côté d’Israël.
Le Hamas ne cesse de prôner avec véhémence l’annihilation totale d’Israël. C’est pourquoi, après les atrocités ignominieuses que cette organisation a commises durant la journée de Simhat Torah, l’objectif d’Israël ne peut être plus clair : éliminer l’élite dirigeante, les infrastructures et tous les pouvoirs économiques du Hamas. Pour Israël, ce sera une guerre longue, qui durera certainement plusieurs semaines, mais nous sommes résolus à atteindre notre objectif final. Il s’agit d’une question de vie ou de mort. C’est eux ou nous !
Depuis le début de ce nouvel affrontement, Israël a bénéficié de la compréhension de la communauté internationale. Craignez-vous que ce soutien s’atténue au fur et à mesure que la guerre à Gaza s’intensifiera ?
Pour l’instant, en Occident, la majorité des opinions publiques soutient Israël et son droit légitime à se défendre contre une organisation terroriste constituée de barbares fanatiques. L’appui des États-Unis est ferme et sans réserve. J’ai connu au long de ma carrière diplomatique plusieurs présidents américains, Ronald Reagan, George Bush père… Le discours prononcé par Joe Biden quelques heures après l’attaque du Hamas contre Israël m’a sidéré. Je n’avais jamais entendu un président des États-Unis s’identifier avec autant d’émotion et d’empathie à Israël. Son soutien est total. Je sais bien que bientôt des images éprouvantes émanant de Gaza inonderont les réseaux sociaux : les bombardements de l’aviation israélienne, la population civile palestinienne privée d’eau, d’électricité et de gaz, une crise humanitaire…
Malheureusement, je suis conscient de la force implacable de ces images. Mais cette fois-ci, nous avons montré au monde entier le niveau de monstruosité, de sauvagerie et d’inhumanité du Hamas. Les membres de cette organisation djihadiste ne se conduisent pas comme des hommes, mais comme des animaux. J’espère que le monde sera plus indulgent à l’égard d’Israël cette fois-ci et qu’il réalisera pourquoi nous devons décimer le leadership et toutes les infrastructures du Hamas.
En Israël, l’heure est désormais à l’unité.
Le peuple d’Israël a mis derrière lui les querelles qui l’ont divisé ces derniers mois. Il est plus uni que jamais pour faire face à un réel danger existentiel. Le grand nombre de civils israéliens tués lors de cette attaque barbare nous rappelle à quel point il n’y a aucune différence entre les terroristes du Hamas et ceux de Daesch – l’État islamique –. Le jour sacré de Simhat Torah, les miliciens du Hamas ont décapité des dizaines de bébés et d’enfants, violé des jeunes filles, torturé et assassiné abjectement des vieillards surpris dans leur sommeil, mitraillé plus de 250 jeunes qui participaient à un festival de musique dans le sud du pays.
Une tragédie sans précédent par le nombre de victimes et le niveau de violence déployée. Des scènes atroces qui demeureront gravées dans nos mémoires meurtries à toujours. L’unité d’Israël s’est traduite aussi politiquement avec la mise sur pied d’un gouvernement d’union nationale. Les Israéliens ont mis derrière eux leurs divisions pour affronter un ennemi des plus impitoyables résolu à les tuer.
Cette guerre portera-t-elle un coup fatal au processus de normalisation politique, qui était très avancé, entre Israël et l’Arabie Saoudite ?
Oui, c’est un coup, mais pas fatal, porté au processus de normalisation politique et diplomatique avec des pays arabes du Moyen-Orient. L’établissement de relations politiques avec l’Arabie Saoudite, dont la dynamique était très prometteuse, devra attendre la fin de l’opération militaire de Tsahal à Gaza. Pour Israël, cette guerre est une question de survie. Après ce conflit, nous explorerons les voies les plus réalistes pour relancer ce processus de normalisation avec les pays arabes, dont plusieurs souhaitent aussi faire la paix avec Israël. Regrettablement, on ne peut pas parler de paix dans le contexte de guerre qui sévit aujourd’hui.