Le respect des parents pendant la pandémie du COVID-19 (Kibbud Av Ve’Empathy during Covid 19)

PAR Briah Cahana

Briah Kahana (traduction Martine Schieffer)

Briah Cahana

 

 

 

 

 

 

 

English version to follow.

Pendant près de quatre mois, alors que la glace a fondu pour laisser place à un été en pleine floraison et à des restrictions qui s’assouplissent, notre maison familiale était branchée sur la « station Coronavirus » avec un zèle indéfectible. Nous avons suivi les minutieux mouvements de cette invisible et menaçante pandémie qui a franchi les océans et traversé les frontières créées par l’être humain pour s’étendre au Canada. Nous avons suivi de près les changements impétueux de protocoles de notre gouvernement en réponse à son invasion de plus en plus rapprochée dans notre monde d’inquiétude. Avec mon père, rabbin-poète (Ronnie Cahana), aux capacités respiratoires compromises, résidant au Centre gériatrique Donald-Berman-Maïmonides, ma mère, travailleuse sociale œuvrant en première ligne dans une résidence assistée et l’une de mes sœurs, étudiante en soins infirmiers, les questions de santé publique, de distanciation physique et de sécurité de nos populations les plus vulnérables et les plus exposées sont personnelles et touchent notre maison de bien des façons.

Dans cet enchevêtrement mouvant où nous sommes tous reliés, il est clair que nos choix personnels ont une incidence collective. L’enjeu terrifiant réside dans notre aptitude à négocier la meilleure ligne de conduite compte tenu de nos différents besoins, de nos différentes priorités et de nos capacités individuelles d’agir. Initialement, étant donné les endroits où évoluaient  mes parents, au centre de mes craintes, j’étais pleinement en faveur de la campagne de confinement et de trouver des solutions créatives en ligne pour rester occupée et connectée afin de réduire les vecteurs de contact et de transmission. En tant que réponse collective, cela a semblé fonctionner. Néanmoins, attendre simplement que la pandémie se « termine » et se cacher derrière les mantras « Rester à la maison = sauver des vies » ou « Ça va bien aller » étaient trop abstrait, décourageant et même faux  au regard de qui se passait dans les CHSLD.

En fait, c’est précisément dans ces établissements que 82 % des décès dus à la COVID-19 au Canada sont tragiquement survenus, jusqu’à présent. Cet horrible résultat était-il évitable? En mars, sachant à quel point ces endroits étaient sous-financés et manquaient de personnel, nous pouvions le voir venir à moins que le ministère de la Santé ne s’efforça de mettre en place un plan hermétique comprenant des tests de dépistage constants et un EPI complet (équipement de protection individuelle), ce qui aurait au moins réduit les cas d’éclosions comme cela avait été bien effectué dans d’autres pays et en Colombie-Britannique. M’abstenir d’agir a créé en moi une dissonance cognitive puisque j’étais en sécurité dans ma vie adaptée en ligne, alors que je savais que d’autres ne l’étaient pas. Je pouvais voir une vague désastreuse se rapprocher d’eux, et j’avais l’impression de ne pouvoir rien faire, mais pire encore, que ne rien faireétait la chose à faire. J’avais tort.

Une autre de mes sœurs, vivant en Arizona, à 4 000 km de Montréal, m’a montré comment nous pouvions simultanément respecter la distanciation physique et travailler sans relâche pour protéger les personnes les plus à risque en anticipant et en prenant des mesures là où l’on discernait des lacunes dans le système. Son travail est né du désir de protéger mon père et est devenu depuis un grand mouvement organisé pour lutter contre l’âgisme, la discrimination fondée sur la capacité physique et le racisme dans les établissements de soins de longue durée et dans le tissu social. Lorsqu’il a été clair que nous ne pouvions pas ramener mon père à la maison et lui prodiguer ses soins personnels, l’objectif alors de ma sœur a été de le protéger dans son établissement. Cependant, pour qu’il y soit en sécurité, toutes les personnes travaillant et vivant dans la résidence devaient également être en sécurité et soutenues. L’élargissement de ce cercle de préoccupation a suscité de nombreuses demandes de renseignements et de recherche de points d’entrée pour intervenir, communiquer et établir des relations. Les membres du personnel avaient-ils tous les EPI dont ils avaient besoin? Avaient-ils des moyens sûrs pour se rendre au travail et en revenir? Sans soignants supplémentaires et membres de la famille venant soutenir les résidents, comment pouvions-nous nous assurer qu’un personnel débordé n’aboutirait pas à de la négligence? Ma sœur a ensuite créé un groupe Facebook pour connecter les familles et les amis des résidents de Maïmonides, ce qui a permis de rationaliser les informations et a servi de plateforme pour centraliser différents efforts comme la fourniture de protège-oreilles (adaptés aux masques ndr), des repas pour le personnel et des trajets Uber prépayés pour aller à l’établissement et en revenir. Des pétitions ont été rédigées et sont actuellement en circulation pour faire face à la crise des soins de longue durée (https://www.change.org/p/petition-for-emergency-funds-for-c-19-crisis-in-long- soins de longue durée) ainsi qu’à des protocoles de triage qui seraient discriminatoires à l’égard des personnes handicapées (https://triage.quebec/signez-la-petition/). Un autre projet d’envergure qui a vu le jour est Artists4longtermcare (https://www.artists4longtermcare.org/) où les artistes peuvent utiliser leur art et leurs histoires pour des causes.

La pléthore de manières d’intervenir en solidarité avec les aînés, les personnes handicapées et les travailleurs de ces établissements a été cathartique pour moi. Au lieu d’accorder ma confiance au gouvernement et de laisser les choses se dérouler, ma sœur m’a ouvert les yeux sur la façon dont nous pouvons transformer nos préoccupations en action collective positive. Le judaïsme nous enseigne que nous devons honorer notre père et notre mère, et dans cette situation, les personnes les plus à risque d’être touchées par la COVID-19 sont nos mères, nos pères, nos frères et sœurs et nos conjoints. Que ferons-nous pour les protéger et conjurer la deuxième vague? Envisagerez-vous de vous joindre au cercle de soins et d’action? Croyez-moi, c’est mieux que de se contenter d’attendre la fin de la pandémie ou, pire, d’ignorer ses conséquences sur les personnes les plus vulnérables.

 

Kibbud Av Ve’Empathy during Covid 19

For almost four months straight, as the ice on the ground has melted into full summer bloom and restrictions are being loosened, our family household has been tuned into the “Coronavirus Station” with an unyielding zeal. We have followed the minutiae movements of this invisible and menacing pandemic as it has crossed oceans and inevitably dashed across human-made borders into Canada. And we’ve monitored our government’s impetuous changing protocols in response to it creeping closer into our world of concern. With my father, a rabbi-poet, living at Donald Berman Maimonides Geriatric Center with compromised lung-capacity, my mother, a social-worker on the frontlines in an assisted living facility, and one of my sisters studying nursing, the issues of public health, physical distancing and safety of our most vulnerable and exposed populations are personal and hit home from multiple angles.

In this moving lattice where we’re all interconnected, it is crystal clear how our personal choices have collective impact. The terrifying challenge lies in our ability to negotiate what is the best course of action given our different needs, priorities and independent abilities to act. Initially, given my locus of worries, I was in full support of the campaign to stay home and find creative, on-line solutions to keep busy and connected so as to reduce the vectors of contact and transmission. It appeared to work as a collective response. Nevertheless, simply waiting for the pandemic to be “over” and hiding behind the mantra ‘Stay home=Save lives’ or ‘Ça va bien aller’ was too abstract, disempowering and even false compared to what was happening in CHSLDs. 

In fact, it is precisely in these facilities that 82% of the Covid-19 deaths in Canada have tragically occurred, thus far. Was this horrible outcome preventable? Back in March, knowing how these places are underfunded and understaffed, we could see it coming unless the health ministry implemented an airtight plan including constant testing and full PPE (Personal Protective Equipment), which would have at least lowered the cases of outbreaks as was done successfully in other countries and in British Columbia.  Refraining from action created a cognitive dissonance for me, since I was safe in my on-line adapted life, but I knew others were definitely not. I could see a disastrous wave approaching them and felt like I could do nothing, but even worse, that doing nothing was the advised thing to do. I was wrong.

Another one of my sisters, living in Arizona, showed me how we can simultaneously respect social distancing (Arizona is 4000km from Montreal) and tirelessly work on protecting individuals most at risk by thinking ahead and stepping up where she saw gaps in the system. Her work stemmed from the desire to protect my father and has since grown into a large organized movement to fight ageism, ableism and racism in long-term care facilities and in the fabric of our society.  When it was clear that we could not bring my father home and provide his personal care, her next goal was to protect him at his facility. In order for him to be safe there, however, everyone working and living at the residence had to be safe and supported, too. Widening that circle of concern opened up many inquiries and entry points for action, communication and relationship building. Did the staff have all the PPE they needed? Did they have safe ways to come to and from work? Without extra caregivers and family members coming in to support residents, how could we ensure that an overstretched staff doesn’t translate into neglect? She then created a facebook group to connect families and friends of residents at Maimonides, which helped stream-line information and served as a platform to organize different efforts such as providing ear-guards, meals for the staff and pre-paid uber-rides to and from the facility. Petitions were written and are currently in circulation both to address the long-term care crisis (https://www.change.org/p/petition-for-emergency-funds-for-c-19-crisis-in-long-term-care) as well as triage protocols that would discriminate against people with disabilities (https://triage.quebec/signez-la-petition/).  Another extensive project that emerged is artists4longtermcare (https://www.artists4longtermcare.org/) where artists can use their art and storytelling for advocacy. 

The plethora of ways to take action in solidarity with elders, people with disabilities and workers in these facilities was cathartic for me. Instead of putting my faith in the government and letting things play out, my sister opened my eyes for how we can transform our concern into collective positive action. Judaism teaches that we must honour our father and mother and in this situation the people most susceptible to Covid19 are all our mothers and fathers and siblings and spouses. What will we do to protect them and stave off the second wave? Will you consider joining in the circle of care and action? Trust me; it is better than just waiting the pandemic out or, worse, ignoring its impact on those most vulnerable to it.

Top