Elles et ils ont publié – septembre 2019
PAR SONIA SARAH LIPSYC
TENOU’A. Atelier de pensée(s) juive(s) et L’ÉCLAIREUR. Pensée juive en mouvement.
Ces deux revues de qualité habitent le paysage juif francophone. Tenou’a, la plus ancienne, est une production du Mouvement juif libéral, mais lorsque le rabbin Delphine Horvilleur en est devenue responsable avec la complicité du rédacteur en chef, Antoine Strobel-Dahan, ils ont métamorphosé cette publication. Ils l’ont d’abord ouverte à tous les courants du judaïsme qui ont accepté d’y participer, des hassidim aux orthodoxes, consistoriaux ou modernes, traditionalistes, conservative, etc. Ensuite, ils ont traduit des articles du monde anglophone sensibilisant ainsi le judaïsme francophone à d’autres démarches. Enfin l’iconographie, avec la collaboration régulière d’artistes, et la mise en page sont de toute beauté. Tenou’a sort tous les deux mois et certains articles sont mis en ligne sur leur site.
L’autre revue que nous vous conseillons, nouvelle venue, compte déjà à son actif quatre numéros. L’Éclaireur est une émanation des Éclaireurs israélites de France (EIF) qui sollicitent aussi bien des experts que de jeunes adultes issus de ce mouvement qui font preuve de créativité. Cette revue fournie, une centaine de pages, s’intéresse aux problématiques contemporaines et surtout met en valeur un judaïsme traditionaliste cher à l’esprit des EIF. À la fin de chaque numéro, il y a un article de Manitou, c’est-à-dire du rabbin Léon Askénazi (bénie soit sa mémoire) qui fut une figure essentielle du renouveau du judaïsme jusqu’à sa disparition en 1996.
En images, nous avons choisi deux couvertures, en lien avec notre dossier sur Judaïsme et écologie.
Pour les modalités d’abonnement de ces deux revues,
voir respectivement https://tenoua.org et https://www.leclaireur.org/
Jean-Claude Grumberg
La plus précieuse des marchandises, Seuil, Paris, 2019
Faire un conte, comme l’indique le sous-titre de ce petit livre, sur la période tragique de la Shoah est un pari risqué, mais oh combien réussi par J.-C. Grumberg, l’un des auteurs français contemporains les plus féconds pour le théâtre, la télévision, le cinéma et la littérature. Il a d’ailleurs reçu récemment le grand prix de la Société des gens de lettres (SGDL). Il nous raconte en cent pages le devenir d’une petite fille – et celui de sa famille –
qui fut jetée « par amour et par désespoir, enveloppée d’un châle de prière frangé » d’un train de marchandises vers les camps de la mort. Un livre sur l’amour filial et la résilience pour user d’un terme cher à un autre
auteur, Boris Cyrulnik.
Eshkol Nevo
Trois étages,Gallimard, Roman traduit de l’hébreu par Jean-Luc Allouche, Paris, 2019
L’auteur est un fin observateur de la vie et de la psychologie humaine. Il nous décrit avec lucidité les dits et non-dits d’une relation de couple, les rapports du père ou de la mère aux enfants, les joies, craintes ou fantasmes d’un quotidien. Il s’attache ainsi à un homme qui craint que sa petite fille ait été abusée par un vieil homme, à une femme dont le mari est souvent absent et à une juge, veuve et à la retraite, qui cherche à renouer avec son fils. Trois personnes qui habitent trois étages d’un immeuble résidentiel de Tel-Aviv, qui vivent leurs propres histoires ou drames à quelques mètres de leurs voisins, si proches et si lointains. Et qui, comme dans la trilogie Couleurs du réalisateur polonais Kieslowski, apparaissent une fois dans le récit de l’autre.
Cinquième œuvre traduite en français de l’un des auteurs les plus talentueux de la littérature israélienne,
petit-fils de l’homme d’État Levi Eshkol.