Identité Sépharade en 2015: Table ronde

Table ronde: avec Sylvia Assouline, Amnon Suissa et Michael Cohen

Comment définiriez-vous l’identité sépharade à Montréal ? Y-a-t-il selon vous une différence d’incarnation de cette identité selon les générations ? Si oui lesquelles?

Sylvia Assouline

La communauté juive au Maroc comptait ceux dont la présence dans ce pays remonte à des siècles avant la conquête de l’Afrique du Nord par les Arabes et ceux qui sont d’authentiques descendants de juifs expulsés d’Espagne (Spharad). Les uns et les autres, néanmoins, étaient identifiés comme Juifs marocains. Rendus en Israël pour être juifs comme tout le monde et espérant mettre fin à la dichotomie entre l’appartenance religieuse et nationale, ils se sont trouvés qualifiés de Marocaïm. Arrivés à Montréal, une autre épithète les attendait. Ils étaient désormais des Sépharades.Chose curieuse, cette nouvelle identité ne faisait pas référence au passé glorieux des Juifs expulsés d’Espagne et qui se sont répandus dans tout le bassin méditerranéen et ailleurs, ni à leurs illustres ancêtres, ni aux différentes connotations que le terme sépharade véhicule, mais à un groupe d’individus juifs venant d’un pays arabe et parlant français par opposition aux Juifs ashkénazes anglophones venus d’Europe.

Amnon Suissa

Difficile de répondre à cette question complexe et multifactorielle. Il n’y a pas qu’une identité sépharade, à Montréal ou ailleurs, mais bien des identités. Au plan historique, depuis la destruction du Temple, les lieux communautaires (synagogues) ont occupé une place prépondérante dans le processus identitaire. Ils ont permis la survie et le renouvellement démographique des familles/communautés sépharades et du peuple juif en général. N’ayant pas de terre où poser les pieds, l’identité s’appuie alors sur sa résilience dans son exil, ou comme dirait le psychiatre et psychanalyste juif français Boris Cyrulnik son « merveilleux malheur ».
En reprenant la métaphore de l’arbre et ses racines, on peut dire qu’il existe plusieurs couches à l’identité sépharade. D’abord, les feuilles et les branches, cette première manifestation visible (habillement, langue, folklore, nourriture, comportements) comme si celle-ci suffit à définir l’identité entière et globale. Creusant un peu, on aperçoit la deuxième couche : le tronc (famille, éducation, santé, travail) soutenant une partie importante de l’identité. Enfin, les racines. Invisibles à l’œil nu, cette troisième couche est la base de nos valeurs profondes, de notre vision du monde, du vrai soi identitaire. Déracinée des lieux où elle est née, l’identité sépharade ne peut être qu’en mutation, un continuum. Parfois, elle s’exprimera davantage via son appartenance à Israël, au Maroc, à la France, à Montréal ou ailleurs. À d’autres moments, elle sera plus universelle, plus citoyenne, plus interculturelle. L’essentiel de notre identité sépharade se retrouve dans un certain Patrimoine culturel : les livres de nos bibliothèques, les œuvres de nos écrivains, philosophes, artistes, scientifiques, artisans. Comme des milliers de sépharades avant nous, nous transportons dans nos valises cette incarnation de l’ici et de l’ailleurs. L’identité sépharade, c’est aussi cet exercice de l’autre qui nous permet de partager ce que nous sommes et de mieux connaître nos racines ou comme dirait Tobie Nathan, ethnopsychiatre juif français d’origine égyptienne, « notre source ».

En lien avec la question de l’incarnation de l’identité sépharade selon les générations, force est de constater que les premières et deuxièmes générations des cohortes de Sépharades à Montréal continuent d’incarner l’identité dans les lieux d’appartenance les plus divers. À mon avis, il n’y a que des réponses subjectives à cette incarnation. Selon le statut social et économique et des trajectoires personnelles, on peut trouver des membres affiliés à des synagogues, à des regroupements de retraités « snow birds » en Floride ou en Israël, à des groupes golden age ou à des clubs. Si la majorité incarne son identité collective via les rituels familiaux du shabbat, de la nourriture, des fêtes, il n’en demeure pas moins qu’on peut incarner son identité à distance tout en partageant ces occasions sur une base plus ponctuelle. Pour les plus jeunes, ils incarnent leur judaïté de manière plus ouverte au monde et souvent à travers la société d’accueil et Israël. Hormis un certain pourcentage qui a épousé un judaïsme à saveur orthodoxe, voire ultra-orthodoxe, la plupart de nos jeunes souvent bilingues et trilingues, baignent dans un judaïsme pluriel, social et culturel.

Michaël Cohen

En deux mots : déracinée et transmutée. Or cette brève définition est tout aussi valable pour rendre compte de l’identité sépharade des communautés établies à Paris, Bruxelles ou Genève.
Mais à Montréal il y a une spécificité. Les juifs sépharades qui ont fraichement débarqué ici n’ont pas eu à se mesurer à une société d’accueil dont le modèle d’intégration exigeait l’assimilation. Bien au contraire! Le modèle d’intégration au Québec est souple. Il relève plus du multiculturalisme où il est de bon aloi de préserver et d’exposer son particularisme communautaire. Je crois que l’identité sépharade à Montréal devrait se définir à l’aune de cette réalité.

La principale différence d’incarnation que je vois entre les générations sépharades à Montréal est linguistique. La première génération sépharade nouvellement arrivée en terre québécoise était typiquement francophone et arabophone. La génération d’après, nait ici, a, bon gré mal gré, favorisé l’anglais et délaissé le français.

Or le changement linguistique est hautement révélateur : il va de paire avec l’émergence de vecteurs culturels, scientifiques et artistiques inédits. On suit bien le mouvement allant du déracinement à la transmutation qui, pour les sépharades de Montréal, s’est surtout cristallisée par l’avènement du changement linguistique.

Considérez-vous que le monde sépharade qui vous entoure a changé depuis votre arrivée ici? Si oui, en quoi?

Sylvia Assouline

Lorsque je suis arrivée au Canada en 1969, beaucoup de Juifs marocains y étaient déjà bien établis. Par esprit grégaire, ils cherchaient à se retrouver lors d’activités sociales, culturelles et cultuelles. Ceux qui avaient été des leaders au Maroc ont continué à œuvrer dans leur champ d’action. Certains dans le domaine cultuel; ils avaient fondé des synagogues de fortune, souvent des gymnases d’écoles étaient aménagés pour les services religieux du Shabbat et jours de fête avec des bénévoles bien versés dans la liturgie marocaine. D’autres organisaient des fêtes sociales très courues telles que le réveillon du Jour de l’An. Les enseignants s’occupaient de l’éducation, l’école Maïmonide était alors embryonnaire. Les artistes avaient créé la Semaine Sépharade devenue La Quinzaine Sépharade puis Festival Séfarad. C’est dire le chemin parcouru. La communauté sépharade prenait racine, forme et constitution au point de devenir la CSUQ dûment instituée. On peut affirmer, sans exagération, que l’on vibrait dans cette merveilleuse terre d’accueil, d’une identité commune, d’une foi puissante dans l’ignorance totale de la signification des textes de Torah que l’on ânonnait dévotement dans les synagogues. Cette situation a énormément changé. Nos jeunes, filles et garçons, reçoivent l’enseignement de notre patrimoine dans les écoles juives. Les adultes, eux-mêmes, élargissent leurs connaissances grâce aux conférences, aux sermons des rabbins, aux diverses études dispensés çà et là. La Torah n’est plus l’apanage des hommes, les femmes s’y intéressent de plus en plus et leur présence à la synagogue est devenue chose normale. Mais… d’autres éléments sont entrés en jeu. Notre jeunesse a été attirée par d’autres mouvances religieuses. Elle se tourne de plus en plus vers les groupes hassidiques Chabad, Breslev et autres. De jeunes couples, les femmes tête couverte de foulards, les hommes arborant barbe et chapeau noir font désormais partie du décor. Ils ont leurs propres écoles et lieux de culte. Une véritable désertion de la communauté sépharade.

Amnon Suissa

Je suis arrivé à Montréal l’été 1974, il y a maintenant un peu plus de 40 ans, pardon 40 hivers. Ce qui a changé depuis mon arrivée, c’est, entre autre, la disparition d’un lieu de rassemblement et de renforcement de l’identité de la jeunesse juive sépharade, soit celui du Centre Hillel. Depuis 1975, Hillel a joué un rôle de tremplin de premier plan dans le processus d’appartenance et d’intégration à Montréal pour la plupart d’entre nous. Hillel offrait des services concrets en accueillant les jeunes universitaires sépharades mais aussi les nouveaux arrivants (accompagnement, bourses, activités intellectuelles, soutien à Israël, défense des droits, soirées culturelles), cela servait de « ciment social ». J’ai été un membre actif durant mes études et directeur durant 2 ans. Aujourd’hui, on ne peut que réaliser ce grand vide pour nos jeunes, Hillel est mort de sa grandeur, comme les dinosaures. J’ai appris que Le Cercle, local pour jeunes cadres sépharades, a fermé ses portes dernièrement faute de fonds.

Michaël Cohen 

Je suis arrivé à Montréal en 1999. J’ignore si le monde sépharade qui m’entoure a changé depuis lors. Il me semble surtout que le fossé linguistique intergénérationnel s’est accentué ces dernières années.

Ce phénomène va se poursuivre avec le temps. Je connais suffisamment de juifs sépharades de mon entourage personnel et professionnel, jeunes et moins jeunes d’ailleurs, qui au mieux chantent un franglais rythmé « switchant » à souhait de la langue de Molière à celle Shakespeare et qui, au pire, ne savent tout simplement plus parler français. Ou presque.

Même si l’arabe est le lien linguistique premier du sépharadisme, la perte du français et la prédominance de l’anglais chez les juifs sépharades montréalais demeure significatif. L’apparition subséquente d’idées et valeurs nouvelles, propres à la culture nord-américaine, reflète le changement structurel du sépharadisme montréalais.

Quelles seraient d’après vous les valeurs propres au monde sépharade qui seraient importantes de poursuivre ici à Montréal (en matière de traditions religieuses, d’éducation, de culture, etc.)? Et les écueils qu’il serait tout aussi important d’éviter?

Sylvia Assouline

Nous sommes pieux sans verser dans l’orthodoxie extrême ni l’intolérance. Sous le Protectorat français nous avons acquis une culture occidentale à tous les niveaux. Elle s’est rajoutée à notre propre culture musicale, liturgique, sociale dominée par notre prédisposition à la joie de vivre, à la générosité, au partage. La synagogue est une extension de la famille avec toutes ses analogies et différences. Il n’y a pas d’austérité dans le monde sépharade. Autant de valeurs à conserver. Malheureusement, nos dirigeants communautaires n’ont pas su œuvrer pour garder bas les frais de scolarité des écoles juives. Beaucoup se sont tournés vers les écoles publiques et ont suivi d’autres mouvances religieuses comme signalé précédemment. De plus, le Festival Séfarade qui devrait être notre fierté et lieu de rassemblement, néglige souvent nos artistes locaux et aliène une grande partie de la communauté par le prix exorbitant des productions. L’écueil majeur demeure celui de n’avoir pas impliqué les jeunes dans toutes les instances de la communauté, de les avoir tenus trop longtemps à l’écart, alors qu’ils sont nés ici et ont une autre vision de la réalité. Notre communauté est vieillissante et nos leaders aussi. Il faut lâcher les rênes et responsabiliser les jeunes, leur faire confiance, les encadrer au besoin et assurer la relève.

Amnon Suissa

Au-delà des traditions religieuses et spirituelles qui se portent, toute proportion gardée, assez bien (Centre Aleph, synagogues, divers lieux de culte et services), il serait utile d’explorer des programmes et des activités qui tiennent compte des conditions et des réalités plus contemporaines. Au plan de l’éducation, les Écoles juives sépharades, dont Maimonide et d’autres, ont prouvé, hors de tout doute, que ce type d’éducation conciliait bien l’identité sépharade avec les défis d’intégration à Montréal et à la société. Au plan culturel, les initiatives ne manquent pas. Les festivals du cinéma israélien ou Festival sépharade et/ou d’activités intellectuelles qui visent à développer des liens avec le monde extérieur sont une très bonne formule. Le hic est que les jeunes y sont rarement présents et cela pose problème dans le ici et maintenant, mais aussi et surtout pour le futur. Dans la mesure où les nouvelles générations de Sépharades sont nées dans un environnement où la technologie et les médias/réseaux sociaux sont la norme, il s’agit de les rejoindre sur des thèmes « plus sexy ».

Dans la colonne des écueils à éviter, la recrudescence de la place de la religion dite ultra orthodoxe au sein de plus en plus de jeunes familles juives sépharades. Selon toute vraisemblance, ce phénomène semble être généralisé à travers le monde. Devant l’ampleur de l’hyperindividualisme grandissant et du consumérisme à outrance, on peut comprendre le recours à des valeurs comprises comme « plus sûres » pour sauvegarder un certain équilibre personnel, familial et social. Alors que depuis des siècles, le judaïsme sépharade, compris comme traditionnel , a réussi à partager ses lettres de noblesse en travaillant sur le comment puis-je être juif tout en étant avec l’autre, ce judaïsme ultra orthodoxe sépharade nous propose une idéologie du repli sur soi. Ce n’est pas seulement la distinction physique et vestimentaire qui produit cette division du dehors/dedans, il y a aussi l’isolement qui se manifeste par une absence quasi totale de liens sociaux alors qu’ils sont vitaux pour réussir son inclusion à la société et exercer pleinement son droit et devoir de citoyen. Inquiets de cette tendance lourde auprès des jeunes sépharades, certains rabbins n’hésitent pas à parler de menaces pour l’identité et la pérennité. La mise sur pied d’un groupe d‘échanges pour les familles vivant ces crises familiales, serait un pas dans la bonne direction et répondrait à un besoin important pour dénouer cette détresse bien réelle.

Michaël Cohen 

La question des valeurs propres au monde sépharade est, en soi, une question fondamentale. Elle dépasse de loin la communauté sépharade de Montréal. Au risque de généraliser, je dirais que les idées et les valeurs propres au monde sépharade sont en péril partout et depuis longtemps.

Le génie du sépharadisme est sérieusement menacé. Des auteurs comme Serge Trigano ou Émile Moatti s’interrogent avec force sur la crise actuelle. Peut-on parler d’élites sépharades capables d’assumer la transmission et la continuité d’un « âge d’or » perdu? Que nous reste-t-il authentiquement du vécu politique, philosophique, littéraire, mystique, poétique ou compassionnel du monde sépharade? Quelles solutions apporter, face à l’archaïsme, à la nostalgie du passé et au folklore dominants?

Les idées et les valeurs sépharades n’ont pas été modelées et remodelées de manière innovatrice, voire audacieuse, pour être transmises et reçues avec authenticité. Or les enjeux de déracinement et de la transmutation n’en exigeaient pas moins. Peut-on prétendre que les valeurs sépharades sont si bien portées qu’on puisse y puiser les caractères culturels et spirituels propres au sépharadisme?

Parlons des Yeshivot sépharades. On y retrouve un regroupement d’individus qui partagent une origine commune. Le limoud qui y est prodigué ne procède pas de la tradition sépharade, mais de la tradition et de la méthode d’étude lituaniennes. La tenue vestimentaire en est une illustration saisissante : le sépharadisme authentique n’imposait certainement pas le port de la chemise blanche et du chapeau noir. Je crois que ce constat vaut mutatis mutandis pour la plupart des autres aspects de la vie intellectuelle, spirituelle ou culturelle du sépharadisme.

Ce qui reste, par une curieuse inertie, c’est la conscience (ou la simple revendication?) d’être sépharade. Mais cette conscience est plus folklorique qu’authentique: elle ne s’abreuve malheureusement pas aux sources de l’héritage spirituel et de l’originale production littéraire, philosophique, mystique et poétique du monde sépharade. Et les sources risquent de se tarir…

Au delà de cette conscience, on assiste à la désertion du monde sépharade vers d’autres mouvements spirituels qui sont aux antipodes de sa tradition. Les Bouzaglo, Benhamou et autres Chétrit « devenus » Loubavitch, Breslev ou autre ne manquent pas à l’appel. Manifestement, le corpus d’intellectuels et de penseurs de haut niveau, d’artistes, de chefs de fil, de chefs spirituels et de responsables communautaires et institutionnels ne semble pas globalement capable d’assumer la mission de transmettre l’héritage du sépharadisme. On a sans doute perdu la trace de cet héritage ou du moins on ne sait comment le ressusciter.
La désertion du monde sépharade vers d’autres mouvements spirituels qui sont aux antipodes me semble par conséquent assez logique. L’héritage spirituel et l’énorme production littéraire, philosophique, mystique et poétique du monde sépharade ne sont pas relayés. Le corpus d’intellectuels et de penseurs de haut niveau, d’artistes, de chefs de fil, de chefs religieux et de responsables communautaires et institutionnels ne semble pas globalement capable d’assumer la mission de transmettre l’héritage du sépharadisme. On a sans doute perdu la trace de cet héritage ou du moins on ne sait comment le ressusciter.

Quel pourrait être l’apport de la communauté sépharade à la communauté juive at large de Montréal ainsi qu’au monde juif en général?

Sylvia Assouline

Servir de pont avec les Québéquois de souche qui croient encore que les Juifs sont tous anglophones, riches et fédéralistes. Le Consul d’Israël en a fait l’expérience récemment…Il nous a relaté durant la dernière Assemblée Générale de la CSUQ, que lors d’un déplacement au Québec , des personnalités québécoises avec qui il s’est entretenu croyaient dur comme fer que tous les Juifs au Canada étaient anglophones, riches et fédéralistes. Il invitait donc la CSUQ à démystifier ces croyances, à se faire connaître davantage au Québec, à montrer la non-uniformité des Juifs, à faire valoir le côté francophone de la communauté sépharade, toutes les belles choses accomplies par la CSUQ au niveau social, culturel et autre, bref à servir de pont entre la communauté juive at large et les Québécois de souche.

Démystifier ces croyances en nous impliquant partout. Le Comité des Femmes Juives francophones faisait un excellent travail d’outreach. Des activités de ALEPH au Musée des Beaux-Arts, comme ce fut le cas récemment est aussi une bonne initiative et il y en a sûrement d’autres qu’il faut amplifier.
Quant au monde juif en général, c’est une grande symphonie et notre partition n’est pas des moindres. Il faut continuer à la faire vibrer dans l’unisson.

Amnon Suissa

Le concept d’équifinalité nous rappelle que plusieurs chemins peuvent mener à un même but et vice-versa, plusieurs buts peuvent être atteints par le même chemin. Il n’y a donc pas une façon unique d’être juif sépharade, au contraire, multiplier des ponts avec la diversité, c’est un plus et non un moins. Dans cette optique, et en termes d’apport, il y a lieu d’explorer plus d’échanges intellectuels, artistiques, scientifiques avec les communautés et la société d’accueil, sans oublier nos confrères ashkénazes qui ont une certaine expérience et un long passé à ce chapitre. Dans la mesure où l’histoire du judaïsme et du sépharadisme démontre que les plus grandes contributions universelles passent par la diversité et le pluralisme, on peut très bien concilier le singulier et l’universel et féconder nos pensées individuellement et collectivement. Il n’y a pas d’incompatibilité à transmettre notre identité aux jeunes générations sans tomber dans la « monomanie » religieuse et identitaire. L’histoire de notre jeune communauté sépharade à Montréal est riche en réalisations extraordinaires grâce à plusieurs leaders dévoués et aux actions de ses membres. Dans la mesure où l’on ne reproduit que ce que l’on connait, les repères, rituels et valeurs de ce nous sommes, aux générations futures, ces éléments sont précieux pour notre identité et méritent d’être chéris. Peut-on poursuivre dans cette voie vers un judaïsme pluriel et démocratique ?

Michaël Cohen

La communauté sépharade doit d’abord sortir de son inertie et se remettre en mouvement. Elle doit trouver les moyens de se redonner une forme nouvelle et innovatrice pour qu’émerge, ou plutôt ré-émerge, le génie du sépharadisme. Sans cela, le sépharadisme n’a rien de fondamental à offrir à la communauté juive de Montréal.

Le sépharadisme est comme suspendu entre ciel et terre. Il est à un carrefour entre la mémoire et la régénérescence.

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